La prière de Marie

 

              Du Père Marie-Eugène de l’Enfant Jésus : la Vierge Marie toute mère

 

La Sainte Vierge  exerce sa fonction de maternité dans sa vie et par sa vie.

 

          Notre Seigneur a été médiateur par son sacrifice. Il a prié parce qu’il devait cet hommage à son Père ; il a fait cet acte de dépendance bien que jouissant de la vision béatifique, il eût tout ce qu’il pouvait désirer.

 

          Il a prié aussi pour nous apprendre à le faire. Mais il a prié surtout parce qu’il est le chef du Corps mystique et que, comme tel, il portait, pour les réunir dans ce mystère, toutes les humanités qui lui seraient liées par la grâce, à n’importe quel degré.

 

           Il était toujours en état de prière. Il a recherché pour cela, à certains moments, la solitude et le désert, même durant sa vie publique. Il a prié vocablement ou intérieurement. Il a voulu réaliser ainsi cette union des âmes dans le Corps mystique : c’est la grande intention qu’il nous livre, après la Cène, dans la prière sacerdotale où il demande pour nous cette union individuelle à la divinité, en lui et par lui, au Père, dans l’unité.

 

           Comment la Vierge a-t-elle prié ?

 

            Nous pourrions dire de sa prière presque la même chose que de celle de Notre- Seigneur. la prière est une demande, une élévation de notre âme vers Dieu. Mais chez la Vierge cette union à Dieu est constante, même son activité extérieure ne nuit en rien à son union. Serait-ce l’expression d’un besoin ? mais elle trouvait tout en son union

 

              Pourtant la Vierge  a prié.

 

         Elle a prié, elle aussi, pour rendre à Dieu son hommage de dépendance mais surtout elle a prié parce qu’elle était mère : mère des hommes. La Vierge portait une grâce immense qui l’unissait au Verbe. Elle priait pour que cette grâce de son Fils passe dans les âmes et se réalise, pour que son règne arrive, pour que se constitue le Corps mystique.

 

         Dans quelle conditions Marie a-t-elle prié ? Avait-elle besoin de silence et l’a-t-elle cherché ? Oui, mais elle en avait tellement moins besoin que nous.  Son union avec Dieu l’écartait, presque de soi, des bruits et de l’agitation des événements extérieurs. Pour l’Annonciation, la Vierge était dans la solitude de Nazareth et plus tard, elle y revint, loin du bruit. C’est une leçon pour nous : nous devons chercher la solitude et le silence pour prier.

 

          Comment la Vierge a-t-elle prié ?

 

         Par la prière vocale, c’est très probable, avec tout le peuple, dans le chant des psaumes. C’était un acte de soumission à Dieu. Mais nous sommes obligés d’aller plus loin pour comprendre sa prière : il nous faut retourner à Notre–Seigneur.

 

         Qu’est-ce que la prière de Notre Seigneur ?

         Dans la solitude et la paix de la prière, Notre Seigneur trouvait le repos : repos des sens, repos des puissances créatrices, de l’imagination, de l’intelligence. Tout s’orientait vers l’intérieur, vers le contact avec la divinité. L’imagination s’orientait vers le centre de l’âme ; l’intelligence vers la lumière au-dedans ; la volonté tendait vers l’onction divine. L’union hypostatique n’était pas en ces moments plus étroite, mais l’apaisement de l’humanité lui faisait sentir plus profondément l’onction de la divinité.

 

           Toute proportion gardée, et sans l’union hypostatique, il en est de même de la prière de la Vierge.

 

           Elle avait une grâce puissante pour envelopper tous ses sens. La Vierge était dans un état continuel supérieur aux extases – durant lesquels les sens et les facultés sont saisis et comme suspendus- parce que, chez elle, les sens et les facultés supportaient sans faiblesse l’emprise de la miséricorde sur son âme. Et grâce au don d’intégrité, elle ne connaissait ni l’agitation ni la révolte, ni les retours et les dégoûts que nous trouvons en nous comme fruit de la concupiscence. Il n’avait chez elle ni résistance, ni rudesse dans les facultés comme en nous cette rudesse qui nous empêche de recevoir la lumière de Dieu

Notre âme a besoin d’être formée brisée par l’onction divine. Chez la Vierge, tout est parfait, apaisé, et l’onction divine descend, pénètre  sans résistance. Elle est inondée de grâce, sursaturée de Dieu, « pleine de grâce ! » : le mot de l’ange est rigoureusement vrai.

 

           Sa prière est donc son recueillement perpétuel en Dieu et, si elle fait oraison, il n’y a plus en elle qu’une vie : la vie de la Trinité Sainte qui agit pleinement, la vie divine qui se réfléchit en elle comme en un pur miroir, sans une tache qui absorberait une part de clarté, à tel point qu’en la voyant on croirait voir Dieu lui-même.

 

           Son état de prière est un état d’union parfaite à Dieu. Plus loin que sa grâce, nous voyons en elle la Trinité Sainte. Nous trouvons là le commentaire de ce que dit sainte Thérèse de l’oraison : « commerce d’amitié avec Dieu ». Elle ne dit pas commerce du cœur avec Dieu, ou de l’intelligence ou de la volonté, non l’être tout entier y participe. Nous devons tendre à cette union complète avec Dieu, nous devons, nous aussi, nous sursaturer de Dieu. Chacun de nous aura sa forme propre d’oraison, mais le sommet sera toujours l’union qui se réalisera dans la transformation d’amour dont parle saint Jean de la Croix.  

 

            Ne croyons pas que la prière de la vierge reste sans formes particulières. Il y a en elle aussi différents modes d’onction et de lumière et différents modes d’expression. Essayons de deviner quelques-uns de ces modes dans les divers états de sa vie

 

              Avant l’Annonciation, Marie est le fille de Dieu qui prie.

 

         Certainement, elle ne connaît pas sa maternité divine. Elle sait sa grâce, le trésor qu’elle possède, l’abondance de cette grâce ; mais elle s’ignore portant, en ce sens qu’elle ne connaît pas la supériorité de cette grâce sur la grâce ordinaire et commune. La Vierge n’est préoccupée que de s’unir à Dieu ; C’est un dégagement de soi, cette pureté, qui permet à Dieu de se répandre en elle. Elle le recherche continuellement, va le chercher au Temple, s’oriente vers lui comme une enfant vers son Père . Ne croyons pas que la simplicité comporte des horizons bornés.

 

                 Du point de vue humain, assurément, Marie ne recherche pas de satisfaction dans ses facultés ; non elle se tourne uniquement vers Dieu, pratiquant dans les actes extérieurs auxquels l’oblige cette simple orientation, la vertu d’obéissance de l’enfant qui fait ce qu’on lui demande, sans rien chercher au-delà, sans même s’attacher à son travail.

 

           Nous, nous sommes agités dans nos facultés, Marie, non. Elle trouve cet apaisement dans la foi. Tout le reste lui serait une diversion inutile qui la détournerait de son contact avec Dieu. Ce contact, pour elle es tout simple, sans extases ni ravissements, car ses facultés sont assez souples pour recevoir et subir sans trace dans le sens, l’éclat et l’onction de la Divinité présente en elle. Ce qui importe , en effet , ce n’est pas la force mais la souplesse. Les forts sont obligatoirement brisés, les souples plient seulement et résistent.

 

Chez la Vierge, simplicité et souplesse sont parfaites n. Rein ne s’extériorise en elle, «  elle es tellement simple que j’ai peur qu’on ne la connaisse pas » disait-on de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. C’est ce qui se passe en la Vierge à ce moment-là.

 

                  Aussi combien grande est la surprise de l’Incarnation : comment Dieu peut-il venir la chercher, elle, pour son œuvre si belle ? L’âme simple peut recevoir une grâce immense sans s’en rendre compte. Plus tard seulement, devant les réalisations à accomplir , la Vierge se souviendra de toutes les grâces qu’elle recevait et qui la préparaient.

 

                 Au moment où l’Ange lui fait la grande révélation, une lumière intérieure l’éclaire sur elle-même ; elle se voit ainsi que sa mission, qu’elle reçoit dans la plus parfaite humilité car tout en elle est don de Dieu, elle le sait. En propre, elle n’a que petitesse et pauvreté. C’est la vérité, elle a été conçue immaculée, elle n’a pas mérité cette grâce. Et parce qu’elle se voit

la vérité, Marie peur rester humble sous les dons de Dieu.

 

         Aussi la Vierge se soumet-elle avec une grande simplicité : elle a reconnu l’ange du Seigneur car elle est pure et droite, tout est lumineux en elle. Elle se soumet dans un immense acte de foi qui crée en elle les capacités nécessaires pour recevoir le Verbe.

 

             Pour réaliser l’importance de cet acte de foi, pensons à la Visitation où la flamme qui part du Verbe en la Vierge, qui fait tressaillir Jean dans le sein de sa mère et remplit Elisabeth de lumière, fait aussi jaillir le magnifcat. « Vous êtes bienheureuse parce que vous avez cru à la parole qui vous a été dite ».

 

           A l’Annonciation, l’action du Verbe de Dieu opère en Marie dès cet acte de foi et elle devient Mère de Dieu. Et puisque son Fils sera Roi d’un grand peuple, elle sera mère de ce peuple.

 

            Elle découvre alors tous les mystères, avec des ombres profondes qui voilent les réalisations dans le temps. Dès ce moment, penchée sur elle-même, la Vierge découvre dans cette pénombre les merveilles renfermées dans son sein. C’est la période la plus belle. C’est ainsi que l’ont contemplée les prophètes : Isaïe annonce « la Vierge qui enfante ». Elie découvre « la nuée féconde. ».La plénitude de Dieu ne sera jamais plus grande en elle, à cause de cette habitation réelle, physique, du Verbe qui crée des puissances nouvelles.

 

           Dans l’état élevé des âmes transformées, on parle de ces réveils du Verbe dans l’âme. Ici le Verbe ne disparaît point pour réapparaître, il est à demeure. L’être tout entier de la Vierge est attiré vers lui. Tous ses sens apaisés se sont tournés vers lui et il n’existe pour Marie qu’une réalité unique : le Verbe de Dieu en elle.

 

           Elle s’y plonge avec d’autant plus de vigueur qu’en dehors, autour d’elle, c’est l’angoisse : l’angoisse des soupçons qui naissent et qu’elle devine. Alors elle s’enveloppe toute de Dieu, dans l’attente de foi. Saint Jean de la Croix dit à l’âme dont les facultés s’agitent : « faites un acte de foi vigoureux et plongez-vous en Dieu obscur ».

 

          Quelle magnificence dans la Vierge qui doit enfanter ! Rapprochons-nous d’elle ; elle est, dès cet instant,

 la mère des hommes.

 

          Dans la pensée de Dieu, la Vierge est indissolublement unie au Verbe. Dieu avait vu le Verbe dans sa mère et, par sa Mère, le débordement de sa miséricorde sur le monde et sur le Corps mystique. Avec toute sa grâce, la Sainte Vierge réalise cette pensée de Dieu dans l’oraison et surtout quand le Verbe est en elle ; elle recherche l’union avec le Verbe incarné pour réaliser cette pensée divine.

 

 

                 A la Nativité, la manifestation du Verbe en ce monde est une manifestation de lumière : une clarté paraît au ciel, une étoile guide les mages , les anges chantent « paix aux hommes objets de la bienveillance divine » ; et dans cette manifestation symbolique de lumière, tout éclairés aussi par elle, nous trouvons saint Joseph et la Sainte Vierge.

 

                  La vie qui l’a habitée ne quitte pas la Vierge ; cette vie est désormais dans le Verbe incarné qu’elle contemple et que les âmes pourront maintenant contempler comme elle, sous le voile doux de la chair qu’elle lui a donnée. Nous aimons la voir penchée la première sur le regard qui s’ouvre de l’Enfant-Dieu. Nous pensons aux fontaines cristallines de saint Jean de la Croix, aux cavernes de la pierre ; c’est la Vierge qui les connaît la première.

 

                  Toutes ces lumières de la Nativité, les événements les confirment : voici les bergers et voici les mages qui rendent véridiques la parole de l’ange. Voici encore le jour de la Présentation, le chant de Syméon et les paroles de la prophétesse Anne. Tout cela est pour la Vierge un commentaire de ce qu’elle savait sans doute, mais sait-on jamais assez de choses ?

 

                   Et la Vierge rend grâce à Dieu.

 

                   Mais d’autres paroles confirment une deuxième lumière « un glaive de douleur transpercera votre âme. » Elle connaît aussi l’annonce que fait le prophète Isaïe de l’homme de douleur et elle a trouvé dans le yeux de son Fils le mystère de la Rédemption. Voici donc la confirmation.

 

                   Quel sera ce glaive ? Elle ne le sait pas dans le détail, mais le mot suffit pour faire briller dans son oraison le mystère de la Rédemption.

 

                  La Vierge sait et donne son Fils après s’être complètement donnée elle-même. Elle sait qu’elle l’envoie à la souffrance et à la mort, que Dieu lui donnera cela. Toute son oraison à Nazareth est là silencieuse, mystérieuse, avec de la lumière et de la souffrance, déjà sous le voile de la passion, sans détails précis : un ensemble de souffrances où domine le poids du péché. La participation de la Vierge à la Passion ne sera d’ailleurs qu’intérieure, comme la nôtre ; c’est Gethsémani.

 

                 C’est par cette souffrance de mère du Verbe qu’elle engendre les hommes.

 

                 Viennent ensuite les réalisations avec d’abord le ministère public de Notre Seigneur. Marie vibre aux succès obtenus en Galilée et souffre des difficultés en Judée. Voici enfin l’heure annoncée de Jérusalem. Il faut que la Vierge soit là qu’elle accomplisse sa mission de corédemptrice.

 

                Marie monte à Jérusalem où elle verra de ses yeux les souffrances auxquelles il lui faut s’unir. Remarquons les dispositions de la Vierge à ce moment de la Passion. Mère des hommes, c’est à cette seconde grâce qu’elle sacrifie tout ; mère de Dieu, elle devrait défendre son Fils. Elle ne le fait pas car elle voit les desseins de Dieu ; elle n’est pas seulement mère de la Tête du Corps mystique, mais des membres aussi. Marie offre donc son Fils et le donne complètement car la seconde grâce l’exige et commande tout en ce moment ; on pourrait dire qu’alors elle nous aime plus que son Fils.

 

               La Vierge se donne aussi, elle-même en assistant, visiblement et les yeux grands ouverts, à la passion sur le Calvaire.

 

        Qui pourra connaître la souffrance de Jésus ? Seule la Vierge le peut car seule elle a été au fond de l’âme du Christ, en tous les instants, et surtout en celui-là. Marie voit en Jésus l’opposition douloureuse du péché et de la pureté divine ; elle ressent toute la rudesse des coups qui tombent sur cette sensibilité fine et puissante. Cependant il n’y a pas en elle d e faiblesse, pas de spasme. Non. La grâce de la maternité la soutient. Elle sait le pourquoi de tout cela, et elle ne faiblit pas, ni au cri de Notre Seigneur, ni à son dernier soupir.

 

           La Vierge sait, comme le sauront les saints, qu’elle enfante des âmes par sa souffrance, et Notre Seigneur veut confirmer extérieurement cette lumière intérieure. Il lui présente saint Jean en qui elle voit l’humanité régénérée : «  Voilà ton Fils ».

 

            Marie reste debout après la mort du Christ, au Calvaire, et c’est là qu’elle est la plus belle. Il semble que son œuvre est détruite. Pourquoi rester là ? Pour garder et représenter l’espérance.

 

          Elle tient le corps de son Fils entre ses bras, elle a à sa disposition le sang du Christ qu’elle va pouvoir répandre. Et parce qu’elle est mère du Christ mort, elle est aussi mère de la Vie, mère du Corps mystique qui va se construire par le mérite de la mort de Notre Seigneur.

 

          Est-ce que cela détruit l’angoisse ? Non. Le s contraires s’allient dans la vie spirituelle. La Vierge reste droite dans la lutte des deux amours. La maternité des hommes a blessé la maternité divine d’une indicible souffrance. Sainte Thérèse d’Avila dit que Notre Seigneur vint très rapidement faire cesser cette douleur dont la Vierge serait morte assurément, car songeons qu’en Marie l’oraison se poursuit toujours, toutes ses facultés sont orientées vers Dieu, vers sa lumière, qu’elle soit lumière de joie ou lumière douloureuse.

 

           Toute l’âme de la Vierge va participer, aussi, à la Résurrection.

Quelle joie et quelle gloire de contempler cette humanité transformée , ce triomphe de la vie divine dans le corps du Christ , car c’est aussi la vie qui triomphe dans le Corps mystique ; les apôtres sont là. C’est la réalisation , le commencement des grandes espérances.

 

             Son oraison toujours paisible est cependant triomphante pendant les quarante jours après Pâques.

 

             Ainsi toute sa vie est d’oraison : recevoir chaque chose et les conserver dans son cœur pour les repasser dans la contemplation.

 

             Puis c’est l’Ascension, le départ de Notre Seigneur. La tristesse qui envahit les apôtres aurait pu saisir aussi la Vierge. Mais qu’importe que Jésus ne soit plus là puisqu’il a la gloire dans les cieux ; et puis son œuvre est là. Les apôtres n’ont pas encore compris ; c’est Marie qui les prépare à recevoir la lumière dans la prière et dans la paix, avant l’arrivée du Saint-Esprit. Le voici et il l’emplit, elle, la première, pour l’action. 

 

            C’est la nativité du Corps mystique. L’Esprit qui emplit la Vierge la féconde une seconde fois jusqu’à la consommation des siècles, et sa présence en elle se joint à celle du Verbe. C’est à ce moment qu’elle devient Mère de  Vie. Jusqu’alors la lumière lui avait été voilée ; aujourd’hui, elle déborde. Ne conçoit-on pas alors le désir qu’eut Marie de se retirer dans la solitude et le recueillement, pour recevoir en plénitude l’Esprit-Saint, et le répandre avec plus d’abondance sur Pierre, Paul, Jean et sentir que la vie naissait autour de l’amour.

 

          La prière de la Vierge se rapproche alors de la prière de Notre Seigneur pour l’union du Corps mystique.

         « Qu’ils soient un avec moi peut elle dire aussi, comme le Verbe l’est avec moi et qu’ils aient toute la lumière que vous m’avez donnée. Je vous prie pour eux, pour qu’ils aient la clarté et l’amour que vous avez versés sur moi. »

 

          Voilà donc l’oraison de la Vierge

 

          Nous aimons à voir ainsi la Vierge non seulement dans la pure lumière de son rayonnement de gloire, mais aussi dans les détails, dans les modalités extérieures que prenait son oraison.

 

          La Vierge a été humaine, plus que nous-mêmes sommes humains ; elle a senti plus profondément que nous parce qu’elle était plus sensible. Elle a souffert plus que nous ne pouvons le faire nous-mêmes.

 

          La Vierge est aussi plus mère que toutes les mères : elle est uniquement mère.

           Après la Pentecôte, elle n’est véritablement que mère, toute livrée à sa grâce maternelle pour laquelle elle a donné son Fils. Aussi nous devons nous sentir enveloppés dans son amour maternel immense. Marie nous a aimés au point de nous sacrifier son Fils ; elle nous est restée après lui, accroissant encore sa grâce, et par là, toujours pour nous, ses capacités d’amour. Rendons à cet amour un hommage immense aussi, de confiance et d’abandon. Livrons-lui toute notre âme, tout notre corps, car notre mère ne fait pas de distinction entre nos besoins, la maternité spirituelle enveloppe tout. Abandonnons tout à cet amour, quelles que soient les circonstances où nous nous trouvons.

          Soyons enfants, véritablement de cette mère de Dieu ; il vient à nous par elle.

             Jésus n’a passé publiquement que trois ans sur la terre ; il a passé neuf mois dans le sein et trente ans sur le sein de Marie.

 

              Dans la Sainte Famille, tout vient du coeur de Marie, même saint Joseph. Je le dis parce que ceci est un des plus beaux aspects de la dévotion envers Saint Joseph. Je le dis à la gloire de la mère des vivants, de la mère de tous les saints qui sont les vrais vivants, d’autant plus vivants qu’ils sont plus saints, et donc d’autant plus enfants de la mère unique.

             Bienheureuses les vies dont les heures meilleures ont été épuisées par la contemplation ou au service de la contemplation, dont les heures moins bonnes ont été livrées aux inévitables mesquineries et misères d’ici-bas, mais nous ont apportées la grâce de n’en comprendre et aimer que mieux les  sommets dont elle nous exilaient.

         Tout l’effort de notre vie devrait se résumer à ne pas entraver la marche de la Providence, à respecter l’admirable simplicité des voies de Dieu.

 

 

         L’Evangile est la réponse vivante et complète à la révolte de Satan ; voilà comment le Christ dans son rôle de Rédempteur et sa mère dans celui de Corédemptrice sont, par leur humilité, leur soumission, leur charité, la réaction la plus puissante et la plus éloquente protestation contre l’orgueil satanique, source d’exemple de tous les autres.

        La foi est une croix sur laquelle est crucifiée notre intelligence. Il s’agit de tenir debout auprès de la Croix, sur cette crois si dure pour nous. On ne peut se tenir debout auprès de la Croix qu’avec vous, O Marie ? parce que sur cette croix de la foi, vous êtes crucifiée infiniment plus que nous. Nos petites croix se dressent à côté de votre grande Croix. Il s’agit de nous tenir debout sur notre croix, comme vous vous tenez debout sur votre croix maternelle : « Stabat Mater… »